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Les raisons pour lesquelles la pratique du “quiet quitting” peut avoir des effets néfastes sur notre bien-être mental.

Si remettre en question notre rapport au travail pour éviter de se tuer à la tâche et obtenir un meilleur équilibre de vie peut être salvateur, pointer 8 heures par jour à un job en y étant désengagé·e n’est pas sans conséquences sur notre santé mentale. Travailler sans motivation (autre que gagner sa vie), peut même avoir des effets délétères sur notre bien-être psychique. On fait le point avec Pauline d’Heucqueville, psychologue du travail, psychothérapeute et consultante pour le cabinet Stimulus.Aux États-Unis, on parle de “quiet quitting”, en France de “démission silencieuse”. Les actifs restent en poste, mais font le minimum. Assiste-t-on à une tendance au désengagement au travail ?

Je précise que parfois, on évoque à tort un phénomène de “grande démission” alors que d’après les derniers chiffres de la DARES dont on dispose (octobre 2022), il n’y a pas plus de démissionnaires aujourd’hui que lors de la crise de 2008. La problématique est tout autre : elle est interne au monde de l’entreprise, les individus restent en poste mais affirment de nouvelles revendications. C’est cela qui est vraiment nouveau.

Les recherches sur notre rapport au travail ont montré qu’au-delà du respect de la fiche de poste, de nombreuses personnes trouvent de la motivation dans les comportements pro-sociaux au travail. Cela signifie ne pas travailler uniquement pour gagner un salaire, mais aussi pour les relations sociales, l’autonomie, et la stimulation intellectuelle que cela apporte. Cependant, avec le “quiet quitting”, on observe un retour aux tâches strictement définies dans la fiche de poste, sans volonté de faire des heures supplémentaires, en se limitant au strict minimum. Tout cela dans le but de privilégier et d’investir davantage dans d’autres aspects de la vie personnelle (famille, loisirs, etc.).

Est-ce une forme de résistance face à de mauvaises conditions de travail ?

Un manque de reconnaissance, une charge de travail démesurée, l’absence de perspective d’évolution… Bien sûr, de mauvaises conditions de travail peuvent mener à se désengager ou se détacher de son travail. Mais c’est globalement le rapport au travail dans notre société qui évolue énormément. La dimension sociétale et sociale de l’entreprise va désormais fortement influencer les choix des salariés. La période des confinements a remis la sphère personnelle à une place prépondérante dans le quotidien. Par exemple, aujourd’hui, la tendance chez les cadres est de désirer instaurer la semaine de quatre jours plutôt que de s’inscrire dans une course au meilleur salaire. Tous ces phénomènes appartenant à notre époque vont jouer un rôle sur l’engagement au travail.

Comment expliquer ce changement dans notre rapport au travail ?

La crise du Covid, la crise climatique, économique… Le contexte joue énormément. La jeune génération, celle qui arrive sur le marché du travail, incarne ce changement de rapport au travail. Ceux que je rencontre me disent clairement : « On nous rabâche à longueur de journée que l’avenir climatique est catastrophique, que nous n’aurons pas de retraite… pourquoi je devrais me tuer au travail ? » Quelque part, ces revendications ne sont pas tellement nouvelles, depuis presque un siècle les travailleurs manifestent pour obtenir de meilleures conditions de travail. Sauf qu’avant le Covid, on parlait peu de problématique liée au « sens au travail ». En somme, ces mêmes problématiques existent depuis longtemps, mais s’expriment autrement aujourd’hui car les enjeux sont différents.

Existe-t-il un profil type de “désengagé” au travail ?

N’importe qui peut être détaché ou démotivé au travail. On peut très bien être à deux ans de la retraite et adopter ce comportement. Néanmoins, de mon observation empirique, la jeune génération est moins encline à accepter des conditions de travail difficiles. Ils ont du mal à accepter les horaires imposés, à faire des déplacements… En fait, ils ne veulent plus que le travail soit déconnecté de leur vie quotidienne. Comme s’il y avait un refus que le travail soit pénible. C’est là où il y a un choc qui s’opère.

Bizarrement, s’en tenir strictement à sa fiche de poste semble très difficile. La sociologue Aurélie Jeantet explique que si tous les actifs le faisaient vraiment, les entreprises ne tourneraient plus. C’est la différence entre le « travail prescrit » et « le travail réel ». Au travail, on en fait toujours plus que ce pour quoi on a été embauché, sans même s’en rendre compte ?

Le travail actuel est organisé d’une telle façon que l’on fait beaucoup de choses en-dehors de sa fiche de poste. Ce sont notamment nos comportements extra-rôles, qui nous font dépasser la mission initiale pour laquelle on a été embauché. On peut aider un collègue en difficulté, s’investir dans des moments conviviaux pour la cohésion d’équipe, proposer des idées pour faire progresser la boîte… Tous ces comportements sont significatifs de notre motivation au travail. Ces initiatives sont essentielles au bon fonctionnement d’une organisation et créent les conditions propices à l’expression de la créativité, un moteur fondamental en entrepris

Ludivine
Ludivine Erlanger

Experte en Ressources Humaines reconnue pour son approche innovante et son engagement envers l’éthique professionnelle. Avec plus de 20 ans d’expérience dans le secteur, elle a développé une expertise unique en gestion des talents, diversité, inclusion et développement organisationnel. Diplômée en gestion des ressources humaines, Ludivine a débuté sa carrière dans une multinationale, où elle a rapidement gravi les échelons grâce à sa capacité à réformer les politiques internes pour un environnement de travail équitable.

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